Coups de cœur des lecteurs novembre 2020

Quelques textes chaudement recommandés par deux fidèles de la librairie. Leur ferez-vous une place dans votre bibliothèque ?

Delphine a été transportée par :

Ça raconte sarah, de Pauline Delabroy-Allard (Minuit)

« Immédiatement, j’ai été happée par la précision de la plume virtuose et par cette histoire d’amour dévorant. Un premier roman envoûtant, coup de poing ! »

Franck, quant à lui, a connu une rentrée riche en émotions grâce à ces six romans :

Fraternels, par Ollivier Vincent. (Flammarion)

Tendax pour la période. Suivant le profil du lecteur, ça peut plaire ou déplaire. L’auteur met du temps à installer les choses et à trouver un style, je trouve. Cela manque un peu de fluidité au début mais il faut faire l’effort des 100 premières pages. Ensuite, ce qui est bien, c’est que ce n’est pas manichéen, comme le laissait sous-entendre une bonne partie du livre. Il y a pas mal de suspense, c’est noir comme le temps qui les accompagne, le lecteur et le personnage principal s’embourbent. C’est donc un peu anxiogène. Mais là où c’est quand même assez costaud, c’est qu’au final, le lecteur doit se faire son avis : l’auteur lui a proposé deux chemins, à lui de trancher (ou pas). C’est donc exigeant, explicatif et haletant. Je dois avouer que je suis content de l’avoir fini, parce que j’ai besoin d’autre chose maintenant 🙂

Femmes au bord de la nuit, de Michel Quint (Phébus)

Tour de force, parce que le livre est souvent malaisant, le sujet est dur, la violence est difficile à entendre (dans les deux sens du verbe).On suit plusieurs personnages, dont un, Jacky, trop paradoxal pour être apprécié (journaliste décrivant le rejet populiste mais qui ne cesse d’insulter et de provoquer le réfugié syrien qui « squatte » ses bâtiments, violent avec les femmes, violent avec son ami d’enfance…).Tom, le littéraire, mais aussi joueur, bourreau des cœurs, vivant au crochet de Jacky.Leurs femmes, Cécile et Babette et leurs filles, Géri et Lydie, qui tentent de vivre normalement dans un monde testostéroné.Et le fantôme de Véro, la suicidée, la tant aimée…C’est une lecture qui donne à réfléchir : sur les violences dites ordinaires (qu’elles soient langagières ou physiques), sur l’amour, l’amitié…La voix narrative est vive et originale. Surtout, elle nous guide à travers ce maëlstrom qu’on appelle la vie, avec bienveillance et une touche d’humour. 

La faucille d’or, par Anthony Palou (Le Rocher)

Roman polymorphe sur fond d’enquête policière, le lecteur suit les avancées d’un piètre journaliste-détective, plus soucieux de ses notes de frais et de son couple qui bat de l’aile que des manières de tirer les vers des nez de personnages hauts en couleur (notamment avec le double Breton de Toulouse Lautrec). La voix narrative est souvent caustique et nous fait sourire, malgré la lourdeur qui entoure la disparition d’un marin (elle-même auréolée d’un possible traffic de cocaïne). On quitte finalement à regret ce village du Finistère.

Buveurs de vent, de Franck Bouysse

On est très vite dans l’histoire et on se prend d’affection pour cette fratrie. Les personnages sont attachants (que ce soit le « simplet » Luc, les lourdauds ou la gracieuse Mabel.) Les dialogues sont très vivants et l’auteur réussit à éviter le manichéisme. C’est noir, mais percent de temps à autre des éclairs poétiques très puissants et beaux. Le suspense monte tout au long du texte et il faut attendre la fin pour que ça se dénoue, assez magistralement.

K.o., d’Hector Mathis (Libretto)

C’est un roman étonnant, qui démarre à 1000 à l’heure. La plume est très belle et aérienne, malgré la fange qui entoure le narrateur et la noirceur de ce monde inhospitalier. Plusieurs pépites dans ce roman, des phrases qui cernent bien et poétiquement les choses. On sent une rage qui doit sortir, sublimée par la puissance de son verbe. C’est musical, frais, un bon premier roman qui peut remporter un prix.

Chinatown, intérieur, de Charles Yu (Aux Forges de Vulcain)

Traduit de l’anglais par Aurélie Thiria-Meulemans

Petite claque, sacré OLNI et ça rafraîchit un peu l’horizon. Y a un passage qui exprime bien ce que j’ai ressenti à la lecture de ce livre : lorsque le narrateur parle de la période de 45 jours de silence obligatoire. Sans durer aussi longtemps, je dirai que le livre isole le lecteur qui a vu tout un monde s’agiter et le quitte à regret. C’est plutôt drôle, vif et l’auteur ne prend pas le lecteur pour un idiot (pas de ficelles énormes, comme chez Carré par exemple). Il y a ce qu’il faut d’indignation et de critique de la politique américaine pour rafler quelques prix (à mon avis).